- bigorne
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• bigorgne 1389; provenç. °bigorn; lat. bicornis → bicorne1 ♦ Petite enclume à deux cornes. Bigorne d'orfèvre.2 ♦ Mar. Ciseau de calfat employé pour briser les clous gênant le calfatage.3 ♦ Masse en bois pour fouler les peaux.bigornen. f. Petite enclume d'orfèvre à deux pointes.I.⇒BIGORNE1, subst. fém.A.— Objet à deux pointes, à deux bouts.1. TECHNOL. Enclume très allongée à deux cornes ou saillies latérales. L'outil principal en dehors du marteau et de la forge, c'est l'enclume à deux pointes appelée bigorne (F. FILLON, Le Serrurier, 1942, p. 13).— P. méton. Le travail sur la bigorne :• 1. Allons, tisonnier, lève la main de derrière, hardi la bigorne, (...) scène de soudage par forgerons.D. POULOT, Le Sublime ou le Travailleur comme il est en 1870 et ce qu'il peut être, 1872, p. 171.♦ P. ell., emploi subst. apposé. Poinçon bigorne. Poinçon obtenu par la bigorne :• 2. ... l'objet d'orfèvrerie à marquer est placé sur une enclume, ou bigorne, (...) le coup de poinçon, frappé au marteau, fournit ainsi deux empreintes bien différentes, d'une part le poinçon légal, normalement insculpé sur une partie visible dudit objet, et d'autre part le poinçon bigorne, ...S. GRANDJEAN, L'Orfèvr. du XIXe s. en Europe, 1962, p. 33.2. MAR. Ciseau utilisé pour couper les clous qui gênent le travail du calfatage. PEAUSS. ,,Masse de bois avec laquelle les corroyeurs foulent les peaux mouillées`` (BOUILLET 1859).B.— P. méton., arg.1. [P. réf. à la coiffure à deux cornes (cf. bicorne)] Police, infanterie.2. [P. allus. aux coups répétés frappés sur l'enclume] Bataille. Aller à la bigorne. Monter en ligne, aller à l'attaque.— P. ext. Bagarre (cf. QUENEAU, Pierrot mon ami, 1942, p. 118). Sauver qqn de la bigorne.PRONONC. ET ORTH. :[
]. Ac. Compl. 1842 et BESCH. 1845 admettent une var. bigorgne.
ÉTYMOL. ET HIST. — I.— 1386 bigorgne « bâton ferré par un bout » (A.N. JJ 129, pièce 186 [DU CANGE, s.v. Biscorna] dans GDF. Compl.); 1389 « sorte d'enclume dont chaque extrémité est en pointe » (Arch. admin. de Reims, III, 742, ibid.); 1808 (BOISTE : Bigorne... banc de corroyeur); 1831 mar. (WILL. : Bigorne. Espèce de coin de fer dont se servent les calfats pour couper les clous qui se trouvent dans les joints). II.— 1. 1901 (BRUANT, p. 363 : Police. Bigorne); 2. 1901 (ID., p. 265 : Infanterie [...] Bigorne [...]). III.— 1917 [1916?] « bataille » (cité par G. Esnault 1936 dans IGLF Techn. : Au 109e Inf. aller à la bigorne se dit dès 1917 [sinon 1916?]; c'est, pour parler d'une attaque, aller se faire amocher, ou bigorner); d'où 1942 « bagarre », supra B 2.I empr. au lat. bicornis « qui a deux cornes », début Ier s. (OVIDE, Met., 15, 304 dans TLL s.v., 1972, 19) prob. par l'intermédiaire de l'a. prov. bigorna, 1403, au sens d'« enclume » dans PANSIER, p. 24; cf. prov. mod. bigorno (MISTRAL). II dér. régr. de bigorneau étymol. I 1 et 2 ou emploi iron. du dialectal bigorgne « animal à deux cornes ». III emploi méton. de I (au sens d'« enclume ») avec la valeur de « lieu où l'on frappe » ou bien déverbal de bigorner étymol. 2.STAT. — Fréq. abs. littér. :7.II.⇒BIGORNE2, subst. masc.Langue argotique, jargon. (Attesté dans ROB.).— P. ext. :• Si nous pouvions avoir un compagnon jaspinant le bigorne hollandais, ce serait excellent.HUGO, Correspondance, 1867, p. 58.— Emploi adj. Argotique. Sonnet bigorne (J. RICHEPIN, La Chanson des gueux, 1876, p. 56, 58).PRONONC. :[].
ÉTYMOL. ET HIST. — 1628 « argot » rouscailler bigorne (Le Jargon de l'argot réformé dans SAIN. Sources arg. t. 1, p. 221).De même orig. que bigorne1 étymol. I; à rapprocher du lyonn. bigornu « contrefait, boiteux, tortu » (DU PUITSP.) et du m. fr. bicornu, biscornu (XVIe s., v. ce mot) « qui a une forme irrégulière », le jargon étant une déformation de la lang. courante; dès le XVIe s., le dér. bigornier « qui appartient au royaume d'argot, qui entend l'argot » (HUG.).STAT. — Fréq. abs. littér. :1.BBG. — DARM. Vie 1932, p. 56. — DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 287. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 178. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 33.1. bigorne [bigɔʀn] n. f.ÉTYM. 1389; du lat. bicornis, par l'anc. provençal. → Bicorne.❖———I Techn.1 Petite enclume à deux cornes. || Bigorne carrée, ronde. || Bigorne d'orfèvre reposant sur un billot dit tronchet. || Petite bigorne. ⇒ Bigorneau. || Forger sur la bigorne. ⇒ Bigorner.♦ Chacune des deux extrémités (de l'enclume).2 (1808). Masse en bois pour fouler les peaux (⇒ Corroi).3 (1831). Mar. Ciseau de calfat employé pour briser les clous gênant le calfatage.4 Agric. Pioche à deux fourchons. ⇒ 2. Bigot.———II (1628; par l'idée de « parler de travers, de manière biscornue »). Argot anc. Langue argotique. || Jaspiner bigorne. ⇒ Argot (cit. 3), jargon.0 Ce mot se trouve en français dès 1389 au sens d'outil à deux pointes (…) l'argot a dû reprendre le mot au Midi avec une valeur métaphorique analogue à celle de biscornu.A. Dauzat, Études de linguistique franç., p. 287.❖DÉR. Bigorneau, bigorner.HOM. Bighorn, 2. bigorne.————————2. bigorne [bigɔʀn] n. f.❖♦ Fam. Bataille (militaire). — (1925). Par ext. Rixe, bagarre. ⇒ Bigornage, II. || Une bigorne au couteau. — Aimer la bigorne, la bagarre.1 Les idées de bigorne l'abandonnèrent brusquement, et son premier projet de s'accrocher aux basques du grand patron lui parut de nouveau excellent.R. Queneau, Pierrot mon ami, éd. L. de Poche, p. 99.2 Antoine : — Quand tu en auras marre de la bigorne, tu comprendras comme j'avais raison… La colonie, Bébert, la colonie !… C'est tellement plus large !… Un caïd comme toi ! Tu reviendras bourré !H.-G. Clouzot, et J. Ferry, Quai des Orfèvres (scénario), 1947, in l'Avant-Scène, no 29, p. 34, 1963.❖HOM. Bighorn, 1. bigorne.
Encyclopédie Universelle. 2012.